Mieux comprendre l’impact des difficultés d’allaitement sur la santé mentale maternelle : enseignements d’une étude qualitative fondée sur le modèle COM-B

Gabrielle Rowles, Joseph Keenan, Nicky J. Wright, Karen Hughes, Rebecca Pearson, Hannah Fawcett et Elizabeth C. Braithwaite, chercheurs à la Manchester Metropolitan University, signent une étude parue en 2025 dans Scientific Reports intitulée « Investigating the impact of breastfeeding difficulties on maternal mental health ». Leur objectif : mieux comprendre comment les difficultés d’allaitement impactent la santé mentale des mères, afin d’identifier des pistes d’intervention concrètes. L’étude s’appuie sur les perceptions de 1141 mères recueillies via un questionnaire en ligne.

Une forte motivation des mères, mais des réalités souvent déconcertantes

L’analyse qualitative des réponses des participantes a été structurée à partir du modèle COM-B, qui identifie trois leviers clés du comportement : Capacité, Opportunité et Motivation.

• Les mères se déclarent très motivées à allaiter, souvent parce qu’elles associent cette pratique à la bonne maternité et au bien-être de leur enfant.

• Cependant, les écarts entre leurs attentes et la réalité de l’allaitement (douleurs, techniques, fatigue) engendrent culpabilité, frustration et parfois détresse psychologique.

Trois axes d’amélioration pour les professionnels

1. Renforcer les connaissances anténatales

Les mères rapportent un manque de préparation aux défis réels de l’allaitement, induisant des sentiments d’échec. Le message dominant selon lequel l’allaitement serait « naturel » contribue à une pression psychologique forte lorsque les difficultés surgissent.

➡ Implication clinique : intégrer dans les cours de préparation à la naissance une information plus nuancée sur les difficultés fréquentes (crevasses, douleurs, faible lactation), avec une approche rassurante et sans jugement.

2. Soutenir activement la gestion des douleurs et des difficultés techniques

De nombreuses participantes décrivent des douleurs aiguës (crevasses, mastites, freins restrictifs non détectés), mal prises en charge, avec parfois un refus d’écoute de la part des professionnels.

➡ Implication clinique : améliorer le repérage précoce des difficultés techniques, en formant les professionnels à l’identification des freins de langue, à la gestion de la douleur, et à l’accompagnement sans banalisation.

3. Créer un environnement social et professionnel de soutien

L’étude souligne un manque de soutien émotionnel et pratique. Les mères se sentent souvent jugées, isolées, voire abandonnées par les soignants, ce qui aggrave leur mal-être.

➡ Implication clinique : développer une posture d’écoute active, valoriser toutes les formes de nourrissage, et impliquer l’entourage (conjoints, familles) dans le soutien à l’allaitement.

Conclusion : un levier clé pour la prévention en santé mentale

Ainsi, soutenir efficacement les mères dans les difficultés d’allaitement peut contribuer à réduire la prévalence des troubles de santé mentale postnatale. Les auteurs appellent à une action concertée des professionnels de santé pour offrir des interventions adaptées, fondées sur une compréhension fine des obstacles vécus par les mères.

Référence de l’étude :

Rowles, G., Keenan, J., Wright, N. J., Hughes, K., Pearson, R., Fawcett, H., & Braithwaite, E. C. (2025). Investigating the impact of breastfeeding difficulties on maternal mental health. Scientific Reports, 15(13572). https://doi.org/10.1038/s41598-025-98357-6

Mots clés : allaitement, difficulté, étude, frein de langue, IBCLC, mastite, professionnel, santé, santé mentale, soutien émotionnel