Octobre Rose : Allaitement maternel et Cancer du sein
Octobre Rose, la campagne d’information sur le cancer du sein et sur son dépistage, a débuté.
Le cancer du sein est le cancer le plus fréquemment observé chez les femmes en France et cette maladie restait la première cause de décès par cancer chez les femmes en 2012. S’il est dépisté à un stade précoce, la survie à 5 ans est de 99%.(1)
C’est l’occasion de rappeler le rôle de l’allaitement maternel dans la prévention du cancer du sein.
L’allaitement maternel est, le plus souvent reconnu pour son rôle bénéfique pour la santé du nouveau-né, notamment au niveau immunologique. On parle moins de son rôle positif pour la santé des mères. La revue Lancet a confirmé dans une méta-analyse publiée en 2016 (2) un effet protecteur de l’allaitement maternel pour le cancer du sein avec une réduction de l’incidence de cancer invasif de 4.3% pour chaque cumul de 12 mois d’allaitement.
Il a également été estimé que près de 20000 décès par cancer du sein sont déjà évités chaque année dans le monde grâce à l’effet protecteur de l’allaitement maternel et que plus de 22000 vies seraient sauvées par an en augmentant les durées d’allaitement maternel à 12 mois dans les pays à haut revenus et à 24 mois dans les pays à faibles et moyens revenus.
Différents mécanismes biologiques pourraient expliquer cet effet (3,4) : la différenciation des cellules mammaires pour produire le lait réduit la susceptibilité des tissus aux effets carcinogènes (par exemple de l’œstrogène). De plus l’allaitement produit un schéma unique d’aménorrhée et d’infertilité, réduisant l’exposition hormonale et les risques de cancers. L’excrétion des carcinogènes par le lait, l’exfoliation des tissus mammaires durant la lactation, ainsi que le processus d’apoptose massive lors de la fin de l’allaitement, pourraient réduire le risque de cancer par l’élimination des cellules à l’ADN endommagé. Enfin, allaiter un enfant requiert de l’énergie pour la production de lait, la mobilisation des réserves de graisse et de glucose, et diminue les concentrations d’insuline chez la femme. Or des concentrations élevées chroniques d’insuline peuvent augmenter les concentrations de l’Insulin Growth Factor-1 qui est associé aux phénomènes prolifératifs et anti-apoptose dans le tissu mammaire. Un autre mécanisme d’action pourrait être le TRAIL (Tumor-necrosis-factor related apoptosis inducing ligand), une cytokine présente dans le lait humain qui induit l’apoptose des cellules cancéreuses sans toucher aux cellules saines (5).
Le Journal of Human Lactation a publié en 2017 une autre méta-analyse (3) concernant le risque de cancer du sein chez les femmes ayant allaité (exclusivement ou partiellement) comparé aux femmes ayant nourri leur enfant avec du lait artificiel avec estimation de la dose-réponse par accumulation des durées de l’allaitement. Sur la base d’un total de 65 études inclues, lles résultats montrent une tendance pour un effet protecteur plus important de l’allaitement exclusif par rapport à un allaitement partiel pour le cancer du sein (différence non statistiquement significative). Les femmes ayant allaité exclusivement avaient un risque de cancer du sein significativement diminué de 28% par rapport aux femmes ayant eu un enfant nourri au lait artificiel. Quel que soit le mode d’allaitement (partiel ou exclusif) le risque de cancer était diminué de 12% (chez les femmes pares prémenauposées) et 14% (femmes pares postmenauposées). L’effet dose-réponse observé n’était pas linéaire mais on observait une diminution du risque de cancer avec l’augmentation de la durée cumulée de l’allaitement.
Le World Cancer Research Fund International et l’American Institute for Cancer Research ont publié en 2018 une mise à jour de leur rapport émettant des recommandations concernant la nutrition, l’activité physique et la prévention du cancer à partir de l’analyse des données de la littérature. Dans le sous-rapport sur le cancer du sein, les auteurs concluent avec un fort niveau de preuve que l’allaitement maternel diminue le risque de cancer du sein chez la mère, et que plus l’allaitement est prolongé, plus l’effet protecteur augmente. Une troisième méta-analyse dose-réponse de 13 études (4) a montré une baisse statistiquement significative de risque de cancer de 2 % pour chaque augmentation de 5 mois de la durée d’allaitement.
Dans les campagnes d’information sur la prévention du cancer du sein, l’allaitement maternel a toute sa place et devrait être mis en avant afin que les femmes puissent faire un choix éclairé concernant leur santé lors de la décision du mode d’alimentation de leur enfant.
Bibliographie Octobre Rose :
-
- Institut National du Cancer. Cancer du sein- Quelques chiffres. (consulté le 8/10/2019)
- Victora Cesar G, Bahl R., Barros Aluísio J D, França Giovanny V A, et al. Breastfeeding in the 21st century: epidemiology, mechanisms, and lifelong effect. The Lancet Breastfeeding Series Group. Lancet, 2016, 387, pp. 475-490
- Unar-Munquia M.l. Torres-Mejia G., Colchero M. Arantxa, et al. Breastfeeding Mode and Risk of Breast Cancer : A dose-Response Meta-Analysis. Journal of Human Lactation, 2017, vol 33 n°2 pp 422-434
- World Cancer Research fund /American Institute for Cancer Research. Diet, nutrition, physicial activity and cancer : a Global perspective. Continuous update Project expert Report.2018. (consulté le 8/10/2019)
- Coordination Française Pour l’allaitement Maternel. Allaitement et cancer du sein. (consulté le 03/12/2019)
Ces articles Octobre Rose sont également disponibles sur demande chez IPA. Voir les conditions de consultation au Centre de Ressources CERDAM d’IPA.
Présentation par Elise Armoiry, Consultante en Lactation IBCLC
Publié par : K.M.N., documentaliste
Mise à jour le 03/12/2019
Mots clés : cancer, cancer du sein, prévention, promotion de l'allaitement