Les déterminants commerciaux de la santé – Regard sur l’intervention de Dr. Melissa Mialon lors des JRA 2022
La Journée Régionale de l’Allaitement 2022 vue par Elise Armoiry , pharmacienne et consultante en lactation IBCLC, bénévole et vacataire pour IPA.
Merci à l’équipe d’IPA pour l’organisation de ces journées régionales de l’allaitement 2022.
J’ai beaucoup apprécié l’intervention de Mélissa Mialon, dont le titre était : Pratiques politiques de l’industrie des aliments pour bébé et influence sur les professionnels de santé.
Dans cette présentation, Mme Mialon nous a expliqué les différents déterminants de la santé : déterminants sociaux (la santé dépend de l’endroit où l’on vit, de l’accès à une alimentation saine, etc), déterminants commerciaux. Elle a évoqué les pratiques d’entreprise, notamment l’évasion fiscale, par les industriels fabriquant des aliments pour bébé.
Alors qu’on a bien en tête les pratiques de marketing (et le non-respect du code de l’OMS) des industriels, les pratiques politiques et l’influence sur les professionnels de santé sont parfois insidieuses. Les professionnels de santé sont une porte d’entrée pour les industriels pour un accès aux parents. C’est pourquoi les industriels cultivent le lien avec le monde médical, en finançant des formations , des congrès, des applications, des sites webs de conseils de nutrition (ensuite relayés par des instances publiques). Pour des parents qui voient le nom d’une préparation pour nourrisson apparaître sur un site portant le logo d’une société savante de pédiatrie, alors cette préparation doit être « bonne » puisqu’il y a l’aval de médecins. La place des pouvoirs publics se pose ici : si les industriels s’occupent de former les professionnels de santé, le gouvernement peut se désengager de cette question. Or le contenu de cette formation par les industriels est biaisé, il y a un risque d’influence des professionnels de santé, une prise de conscience est nécessaire.
Mme Mialon a beaucoup insisté sur la notion de l’allaitement qui est la norme biologique, et des préparations pour nourrissons qui sont des produits ultra-transformés. Or les études montrent que les produits ultra-transformés sont nocifs pour la santé, et augmentent le risque d’obésité, de cancers, et de maladies non transmissibles. C’est une information culpabilisante, mais nécessaire. Dans ce contexte elle explique que parallèlement au droit de choisir d’allaiter ou pas, se pose la question du droit de l’enfant, celui de ne pas être malade.
Pour conclure, j’ai apprécié cette présentation, qui pose le cadre du risque d’influence des professionnels de santé par les industriels : se faire offrir un petit déjeuner dans le service avec la commerciale de tel fabricant, avoir des post-it sur son bureau pour tel autre, et un stylo pour un troisième dans la poche ne sont pas des gestes anodins : ce sont des gestes qui soutiennent une industrie ayant pour objectif le profit, et non la santé.
Pour aller plus loin :
- « La deuxième mère » : comment l’industrie de l’alimentation infantile capture la science, les professions de santé et la société civile en France : article publié par Dr. Melissa Mialon, sujet de sa conférence.
- Marketing abusif des substituts du lait maternel : une industrie qui pèse 55 milliards de dollars
- Le Lancet dévoile les tactiques prédatrices de l’industrie des préparations pour nourrissons (PPN)
- Recommandation 11 : Protéger les familles des pressions commerciales en respectant le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel (SLM), aussi appelé Code OMS
- Consultez nos autres articles sur le Code de commercialisation des substituts du lait maternel
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Mots clés : code international sur la commercialisation des substituts du lait maternel (OMS), JRA, JRA 2022, professionnel de santé, retour jra