Les freins : mythe ou réalité ? – Regard sur l’intervention du Dr Gisèle Gremmo-Féger lors des JRA 2021

15 décembre 2021 |

Les Journées Régionales de l’Allaitement 2021 vues par  Marie-Xavier Laporte , diététicienne, consultante en lactation (DIULHAM) et membre du CA d’IPA.

« It is difficult to get a man to understand something when his salary depends on his not understanding it. » – Upton Sinclair

Cette intervention salutaire comme l’avait été le papier « La saga des « freins buccaux restrictifs » chez l’enfant allaité » a fait le tour des principales données que chaque professionnel de l’allaitement devrait connaître à ce sujet.

Pas plus que pour l’homéopathie ou certaines thérapies manuelles, ce n’est pas la prolifération des publications qui valide le bien-fondé d’une théorie. De très nombreuses études concernant les freins buccaux sont de mauvaise qualité, il n’existe pas de consensus sur la définition des freins.

Mme Gremmo-Feger insiste sur la confusion qui est faite entre les freins antérieurs dit « classiques » et les freins dits « postérieurs » dans les études.
Elle revient également sur l’association entre les freins de langue courts et les difficultés d’allaitement, association qui est bien souvent entendue comme causalité alors qu’il n’en est rien dans la littérature.

Elle reprend l’historique de la controverse depuis 2004 avec l’invention du concept de frein postérieur, lequel ne repose sur aucune base scientifique.

Elle creuse le sujet en évoquant des causes possibles de cette épidémie de freins parmi lesquelles, la faiblesse de la culture scientifique, les réseaux sociaux, les publicités, une incompréhension des basiques de l’allaitement, et l’appât du gain… d’autant plus facile quand on connait la détresse des jeunes parents et la bonne foi des professionnels de première ligne prêts à tout pour les aider.

Elle revient ensuite sur les conditions de ces frénotomies profondes, leur dangerosité, l’absence d’évaluation de la douleur des enfants, les possibles complications aiguës et les effets secondaires tardifs comme l’aversion orale qui est mal évaluée. Elle met en garde contre les massages prescrits avant ou après les frénotomies.

Enfin, le docteur revient sur les dernières publications de bonne qualité : les conférences de consensus et la position de l’Academy of Breastfeeding Medicine (ABM)
Et pour finir sur une note d’espoir, elle nous relate les travaux effectués en Nouvelle-Zélande et aux USA pour diminuer avec succès les taux de frénotomies sans perdre sur les taux d’allaitement.

Pour conclure, cette intervention était la bienvenue, car comme pour d’autres chirurgies très pratiquées à certaines époques (épisiotomies, ablation systématique des amygdales, etc.) on sait que les données scientifiques finiront par s’accumuler et les praticiens par abandonner petit à petit ces pratiques.
Bien sûr, on aimerait que ça cesse plus rapidement, car en attendant ce sont les familles et les bébés qui souffrent de ces gestes inutiles et, dans une moindre mesure, les professionnels de l’allaitement s’en trouvent de plus en plus discrédités.

 

Pour aller plus loin  :

*Certains documents sont disponibles au Centre de Ressources Documentaires d’IPA (CERDAM). Consultation sur place et prêt à distance possible pour les adhérents. Voir conditions .
(Devenir bénévole chez IPA)
Publié par : JC, Documentaliste IPA.

Mots clés : , , ,

Articles en lien

  • Allaitement et travail, à l’international et en France

    ERRATUM : Si vous avez téléchargé nos infographies sur Allaitement et travail avant le 02/11/2023, une coquille s’est glissée dans […]

    Lire la suite >
  • Les déterminants commerciaux de la santé – Regard sur l’intervention de Dr. Melissa Mialon lors des JRA 2022

    La Journée Régionale de l’Allaitement 2022 vue par Elise Armoiry , pharmacienne et consultante en lactation IBCLC, bénévole et vacataire […]

    Lire la suite >
  • Diversification alimentaire et troubles alimentaires pédiatriques – Regard sur l’intervention d’Anna Lalot lors de la JRA 2022

    La Journée Régionale de l’Allaitement 2022 vue par Aurélie Merciris, diététicienne nutritionniste, consultante en lactation et membre du CA d’IPA, […]

    Lire la suite >